Les entraves à la méditation- les 5 nivaranas.
Quelle que soit notre méditation — samatha ou vipassana —, nous
pouvons rencontrer différentes entraves, qui parfois la gênent, voire souvent
la paralysent complètement. Ce sont les nivarana. Classées en cinq
catégories, aucune de ces entraves n’épargne le débutant. Elles persistent même
chez les méditants avancés, mais d’une façon amoindrie toutefois.
Les 5 nivaranas ne peuvent être complètement écartés
qu'au 1er jhāna, au minimum. On peut toutefois parler
de nivarana « grossiers » pouvant
être surpassés avant dans la méditation, mais il demeure encore
des nivarana « subtils ».
Nous ne progressons dans la méditation que lorsque nous
parvenons à surpasser ces nivarana. C’est pourquoi il est capital de bien apprendre
à les reconnaître et à les éviter. Tant que demeurent les kilesa, même après
avoir échappé à une ou plusieurs de ces entraves, elles peuvent nous enchaîner
de nouveau et à tout moment. Mieux nous les connaîtrons et moins nous nous
ferons piéger. C’est un peu comme les serpents. Mieux nous les connaissons et
moins nous nous faisons piquer, même si le risque demeure. Et si ces serpents,
ces obstacles, ne nous « piquent » plus
autant, ce n’est pas parce qu’ils sont plus cléments, mais bien parce que nous
sommes attentifs aux signes d’attaque et plus habiles à esquiver leurs « morsures ».
Tout ce qui peut constituer d’une façon ou d’une autre un
empêchement à la méditation, entre dans l’un de ces cinq nivarana. En
étudiant ce groupe des cinq, nous constatons qu’il s’agit exclusivement
d’obstacles intérieurs, c’est-à-dire mentaux. Mais alors, les « attaques »
externes comme le bruit ou la chaleur ne seraient-elles pas considérées comme
des obstacles ? En réalité, elles ne sont considérées comme
des obstacles qu’à partir du moment où on les « laisse
entrer » à
l’intérieur. Quand il y a du bruit ou de la chaleur, nous sommes entravés dans
notre pratique uniquement si nous y prêtons attention et que notre esprit
s’irrite ou espère un état plus silencieux, plus frais, etc.
Une profonde concentration permet d’ignorer totalement les
attaques externes. Toutefois, c’est beaucoup plus délicat à gérer avec une
concentration moindre. Dans ce cas, avant de se soucier des causes internes des
cinq entraves, il convient de veiller à trouver les conditions où les
risques de causes externes sont les plus faibles possible. Nous choisirons donc
pour méditer un lieu ni trop chaud ni trop froid, relativement calme et
tranquille, sans excès d’éclairage, sans difficultés pour obtenir sa
nourriture, et loin de tout ce qui suscite plaisirs et attachements.
Une fois que nous bénéficions de conditions convenables pour
notre méditation, dès la toute première minute de pratique, nous verrons
combien toute la difficulté réside dans les 5 entraves…
Les 5 nivaranas
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Nom
|
Analogie avec l’eau
|
Contraire
|
|
1
|
kamacchanda
Le désir sensoriel |
Eau
teintée |
sukha
Le bonheur |
2
|
byapada
Le mécontentement |
Eau
en ébulition |
piti
La joie |
3
|
thina middha
La paresse et la torpeur |
Eau
gelée |
vicara
L’application soutenue |
4
|
uddhacca kukkucca
L’agitation mentale et les remords |
Eau
balayée par le vent |
ekkagata
La concentration de l’esprit en un seul point |
5
|
vicikiccha
Le doute |
Eau
trouble |
vitakka
La prise ferme |
Il est généralement question de « cinq »
entraves, mais on parle parfois aussi de « six »
entraves. La 6e est avijja. C’est la méconnaissance des 4 Nobles
Vérités.
La
métaphore du désir sensoriel : On ne peut pas voir à travers une eau
teintée.
Le désir sensoriel (kamacchanda)
Comment reconnaître kamacchanda ? Quelle
que soit la sensation que nous pouvons ressentir, ne serait-ce qu’un bref
instant, qu’il ne s’agisse que d’une petite réflexion, aussitôt qu’elle est
plaisante, kamacchanda, le désir sensoriel, est là.
Le
contraire de kamacchanda. Lorsque le désir sensoriel est
totalement absent, apparaît sukha, le bonheur. C’est le quatrième des cinq
facteurs du 1er jhana. L’esprit goûte au bien-être procuré par sa capacité
à demeurer paisiblement sur son objet.
La cause
de kamacchanda. Qu’il s’agisse de visions, de sons, de touchers, de goûts,
d’odeurs ou de pensées, dès lors qu’il s’agit de sensations agréables, notre
esprit s’y colle, s’y complait et s’y attache fortement. En raison de ces
sensations qui peuvent surgir à tout moment, apparaît le désir pour ces
sensations, pour qu’elles durent.
L’antidote
de kāmacchanda. Favoriser le développement de la concentration
par rapport à celui de l’énergie, notamment en prolongeant le temps d’assise. Se
déterminer à rester concentré uniquement sur son objet de méditation quoiqu’il
arrive. S’intéresser sincèrement à l’objet de méditation.
Développer asubha : la contemplation sur l’aspect déplaisant du corps.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Développer asubha : la contemplation sur l’aspect déplaisant du corps.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
La
métaphore du mécontentement : On ne peut pas voir à travers une eau
en ébullition.
Le mécontentement (byapada)
Comment reconnaître byapada ? Au
moindre sentiment d’irritation, de dépréciation, de rejet, de colère ou de
haine, il s’agit de byapada. Byapada peut être engendré par la moindre
pensée d’insatisfaction et peut concerner des choses lointaines dans le passé.
Le
contraire de byapada. Lorsque le mécontentement est totalement
absent, apparaît pīti, la joie. C’est le troisième des cinq facteurs du
1er jhāna. L’esprit est intéressé à son objet.
La cause
de byapada. Lorsque notre esprit évoque des choses véhiculant un sentiment
de discorde, comme des différents avec d’autres personnes, ou qu’il refuse une
situation inconfortable, comme la chaleur ou les insectes harcelants, byapada apparaît.
L’antidote
de byapada. Accepter l’idée que l’unique responsable de notre
mécontentement est nous-même. Penser à tout ce que le Bouddha a dû endurer
pendant de si nombreuses vies pour pouvoir nous donner tout défricher le précieux
chemin du Dhamma.
Développer metta bhavana : la méditation sur la bienveillance.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Développer metta bhavana : la méditation sur la bienveillance.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
La métaphore
de la paresse et la torpeur : On ne peut pas voir à
travers une eau gelée.
La paresse et la torpeur (thina middha)
Comment reconnaître thina
middha ? Quand nous ne parvenons plus à
rester correctement sur notre objet de méditation, que notre concentration « glisse »
continuellement, que notre énergie et notre attention sont brouillées ou
éteintes, c’est thina middha.
Le contraire
de thina middha. Lorsque la paresse et la torpeur sont totalement
absentes, apparaît vicara, l’application soutenue. C’est le quatrième des
cinq facteurs du 1er jhana. L’esprit reste sur son objet.
La cause de thina
middha. Il y a paresse ou torpeur dès que l’esprit n’a plus pour intérêt
principal l’objet de méditation et que l’énergie baisse.
L’antidote
de thina
middha. Favoriser le développement de l’énergie (par exemple, en réduisant le
temps d’assise et en marchant plus). Stimuler physiquement le corps :
regarder quelques instants une source lumineuse, se mettre de l’eau froide sur
le visage, effectuer quelques étirements, méditer debout.. S’intéresser
sincèrement à l’objet de méditation.
Développer marananussati : la considération attentive sur le caractère inévitable de la mort. Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Développer marananussati : la considération attentive sur le caractère inévitable de la mort. Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
La métaphore de l’agitation mentale et les remords : On
ne peut pas voir à travers une eau balayée par le vent.
L’agitation mentale et les remords (uddhacca kukkucca)
Comment reconnaître uddhacca
kukkucca ? Quand l’esprit n’est pas tranquille, qu’il
se sent inquiet ou perturbé — ne serait-ce par un petit
détail —, il y a
agitation mentale. Quand l’esprit ressasse des actes qu’il regrette, il y a
remords. Dans les deux cas, il est incapable de rester fixé sur un seul objet. Nous
nous accrochons à ces pensées inconfortables, avec le sentiment que nous ne
pouvons pas continuer notre méditation tant que le problème à l’origine de
l’agitation mentale ou du remord ne sera pas réglé.
Le
contraire de uddhacca kukkucca. Lorsque l’agitation mentale et les
remords sont totalement absents, apparaît ekkagata, la concentration de
l’esprit en un seul point. C’est le cinquième des cinq facteurs du 1er jhana.
L’esprit est totalement unifié à son objet.
La cause
de uddhacca kukkucca. Tant que l’esprit n’est pas bien centré sur son
objet de méditation, il peut ressentir de l’ennui. Ainsi, il ne manque aucune
occasion pour se divertir. Et quand il n’y a rien, que nous sommes immobiles
les yeux fermés dans le silence, les moindres pensées, inconforts, inquiétudes,
réflexions, souvenirs, culpabilités, sentiments et sensations sont comme autant
de « chaînes
de télévision » dans lesquelles nous nous absorbons de
manière insatiable, même quand c’est désagréable. On adore parler de ses
problèmes !
Si on laisse une seule fourmi apercevoir un cake, elle invite
toute la fourmilière. De la même façon, quand nous commençons à « écouter » un de nos
problèmes, même insignifiant, nous invitons toute la « fourmilière »
d’uddhacca kukkucca : une myriade d’inquiétudes en tout genre. Cet état
d’agitation intérieure peut même provoquer des démangeaisons physiques.
Si nous ne soignons pas bien la qualité de nos actes, cela
engendrera des remords apparaissant pendant la méditation. Les états où
l’activité mentale est relativement calme constituent un terrain très propice à
la remontée en surface des regrets et culpabilités liés aux méconduites de
toutes sortes, même très anciennes. C’est pourquoi il importe d’entretenir
constamment une conduite vertueuse et aussi irréprochable que possible. Sans
une vertu pure, la méditation ne restera qu’un champ d’obstacles.
L’antidote
de uddhacca kukkucca. Entretenir continuellement un comportement vertueux
à la fois physiquement et mentalement, même quand on ne médite pas. Renoncer à
nourrir un sentiment d’agitation mentale ou un remord, quels qu’ils soient et
de quelle façon que ce soit. Se rappeler que l’esprit est ravi de saisir
n’importe quelle occasion pour se divertir, même des sentiments désagréables. Se
déterminer à ne pas bouger du tout. Physique ou mentale, toute gêne, inquiétude
ou inconfort finit par disparaître, à condition de l’ignorer.
Équilibrer les 5 indriyas, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Équilibrer les 5 indriyas, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Le doute (vicikiccha)
Comment reconnaître vicikiccha
? Si le cheminement que nous suivons semble se compliquer, que notre
perception des choses perd de sa clarté, la confusion s’installe et nous
n’arrivons plus à avancer ou pire : nous ne voulons plus poursuivre. L’esprit
embrouillé, nous pouvons commencer à douter, non seulement de nos capacités,
mais aussi de notre guide, de la méthode enseignée, de la méditation en
général, de Bouddha ou du Dhamma.
Le contraire
de vicikiccha. Lorsque le doute est totalement absent,
apparaît vitakka, la prise ferme. C’est le premier des cinq facteurs du
1er jhana. L’esprit se saisit de son objet. D’une certaine façon, le doute
a pour contraire la confiance, mais une fois celle-ci parfaitement établie,
elle correspond inévitablement à une ferme saisie de l’objet.
La cause
de vicikiccha. Les principaux artisans du doute sont le découragement, « Je n’y arrive
plus. Je ne sais plus comment m’y prendre… » et le
scepticisme, « C’est impossible. Je n’ai jamais vu ça… ».
Naturellement, des informations erronées, contradictoires ou mal interprétées
peuvent y contribuer. Le doute est un sentiment de blocage qui paralyse tout
souhait d’effort dans la pratique. Notre tendance naturelle est d’employer la
réflexion pour y remédier, mais celle-ci ne peut au mieux que masquer
temporairement le doute car elle se base sur des pensées, donc sur des
concepts.
L’antidote de vicikiccha. Pratiquer les préceptes, la
concentration et l’attention. Seul l’exercice de la vertu, de la concentration
et de l’attention est en mesure d’anéantir peu à peu le doute. Comprendre ce
qui est pratiqué en se renseignant convenablement auprès d’individus compétents
et inspirant la confiance.
Développer buddhanussati : la considération des qualités de Bouddha.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Développer buddhanussati : la considération des qualités de Bouddha.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.
Source : http://www.dhammadana.org
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