mardi 16 juillet 2013

Les 5 obstacles à la méditation.

Les entraves à la méditation- les 5 nivaranas.

Quelle que soit notre méditation —samatha ou vipassana—, nous pouvons rencontrer différentes entraves, qui parfois la gênent, voire souvent la paralysent complètement. Ce sont les nivarana. Classées en cinq catégories, aucune de ces entraves n’épargne le débutant. Elles persistent même chez les méditants avancés, mais d’une façon amoindrie toutefois.

Les 5 nivaranas ne peuvent être complètement écartés qu'au 1er jhāna, au minimum. On peut toutefois parler de nivarana «grossiers» pouvant être surpassés avant dans la méditation, mais il demeure encore des nivarana «subtils».

Nous ne progressons dans la méditation que lorsque nous parvenons à surpasser ces nivarana. C’est pourquoi il est capital de bien apprendre à les reconnaître et à les éviter. Tant que demeurent les kilesa, même après avoir échappé à une ou plusieurs de ces entraves, elles peuvent nous enchaîner de nouveau et à tout moment. Mieux nous les connaîtrons et moins nous nous ferons piéger. C’est un peu comme les serpents. Mieux nous les connaissons et moins nous nous faisons piquer, même si le risque demeure. Et si ces serpents, ces obstacles, ne nous «piquent» plus autant, ce n’est pas parce qu’ils sont plus cléments, mais bien parce que nous sommes attentifs aux signes d’attaque et plus habiles à esquiver leurs «morsures».

Tout ce qui peut constituer d’une façon ou d’une autre un empêchement à la méditation, entre dans l’un de ces cinq nivarana. En étudiant ce groupe des cinq, nous constatons qu’il s’agit exclusivement d’obstacles intérieurs, c’est-à-dire mentaux. Mais alors, les «attaques» externes comme le bruit ou la chaleur ne seraient-elles pas considérées comme des obstacles? En réalité, elles ne sont considérées comme des obstacles qu’à partir du moment où on les «laisse entrer» à l’intérieur. Quand il y a du bruit ou de la chaleur, nous sommes entravés dans notre pratique uniquement si nous y prêtons attention et que notre esprit s’irrite ou espère un état plus silencieux, plus frais, etc.

Une profonde concentration permet d’ignorer totalement les attaques externes. Toutefois, c’est beaucoup plus délicat à gérer avec une concentration moindre. Dans ce cas, avant de se soucier des causes internes des cinq entraves, il convient de veiller à trouver les conditions où les risques de causes externes sont les plus faibles possible. Nous choisirons donc pour méditer un lieu ni trop chaud ni trop froid, relativement calme et tranquille, sans excès d’éclairage, sans difficultés pour obtenir sa nourriture, et loin de tout ce qui suscite plaisirs et attachements.
Une fois que nous bénéficions de conditions convenables pour notre méditation, dès la toute première minute de pratique, nous verrons combien toute la difficulté réside dans les 5 entraves…

Les 5 nivaranas
Nom
Analogie avec l’eau
Contraire
1
kamacchanda
Le désir sensoriel
Eau
teintée
sukha
Le bonheur
2
byapada
Le mécontentement
Eau
en ébulition
piti
La joie
3
thina middha
La paresse et la torpeur
Eau
gelée
vicara
L’application soutenue
4
uddhacca kukkucca
L’agitation mentale et les remords
Eau
balayée par le vent
ekkagata
La concentration de l’esprit en un seul point
5
vicikiccha
Le doute
Eau
trouble
vitakka
La prise ferme

Il est généralement question de «cinq» entraves, mais on parle parfois aussi de «six» entraves. La 6e est avijja. C’est la méconnaissance des 4 Nobles Vérités.

  

La métaphore du désir sensoriel : On ne peut pas voir à travers une eau teintée.

Le désir sensoriel (kamacchanda)

Comment reconnaître kamacchanda? Quelle que soit la sensation que nous pouvons ressentir, ne serait-ce qu’un bref instant, qu’il ne s’agisse que d’une petite réflexion, aussitôt qu’elle est plaisante, kamacchanda, le désir sensoriel, est là.
Le contraire de kamacchanda. Lorsque le désir sensoriel est totalement absent, apparaît sukha, le bonheur. C’est le quatrième des cinq facteurs du 1er jhana. L’esprit goûte au bien-être procuré par sa capacité à demeurer paisiblement sur son objet.
La cause de kamacchanda. Qu’il s’agisse de visions, de sons, de touchers, de goûts, d’odeurs ou de pensées, dès lors qu’il s’agit de sensations agréables, notre esprit s’y colle, s’y complait et s’y attache fortement. En raison de ces sensations qui peuvent surgir à tout moment, apparaît le désir pour ces sensations, pour qu’elles durent.
L’antidote de kāmacchanda. Favoriser le développement de la concentration par rapport à celui de l’énergie, notamment en prolongeant le temps d’assise. Se déterminer à rester concentré uniquement sur son objet de méditation quoiqu’il arrive. S’intéresser sincèrement à l’objet de méditation.
Développer asubha : la contemplation sur l’aspect déplaisant du corps.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.



La métaphore du mécontentement : On ne peut pas voir à travers une eau en ébullition.

Le mécontentement (byapada)

Comment reconnaître byapada? Au moindre sentiment d’irritation, de dépréciation, de rejet, de colère ou de haine, il s’agit de byapada. Byapada peut être engendré par la moindre pensée d’insatisfaction et peut concerner des choses lointaines dans le passé.
Le contraire de byapada. Lorsque le mécontentement est totalement absent, apparaît pīti, la joie. C’est le troisième des cinq facteurs du 1er jhāna. L’esprit est intéressé à son objet.
La cause de byapada. Lorsque notre esprit évoque des choses véhiculant un sentiment de discorde, comme des différents avec d’autres personnes, ou qu’il refuse une situation inconfortable, comme la chaleur ou les insectes harcelants, byapada apparaît.
L’antidote de byapada. Accepter l’idée que l’unique responsable de notre mécontentement est nous-même. Penser à tout ce que le Bouddha a dû endurer pendant de si nombreuses vies pour pouvoir nous donner tout défricher le précieux chemin du Dhamma.
Développer metta bhavana : la méditation sur la bienveillance.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.



La métaphore de la paresse et la torpeur : On ne peut pas voir à travers une eau gelée.

La paresse et la torpeur (thina middha)

Comment reconnaître thina middha? Quand nous ne parvenons plus à rester correctement sur notre objet de méditation, que notre concentration «glisse» continuellement, que notre énergie et notre attention sont brouillées ou éteintes, c’est thina middha.
Le contraire de thina middha. Lorsque la paresse et la torpeur sont totalement absentes, apparaît vicara, l’application soutenue. C’est le quatrième des cinq facteurs du 1er jhana. L’esprit reste sur son objet.
La cause de thina middha. Il y a paresse ou torpeur dès que l’esprit n’a plus pour intérêt principal l’objet de méditation et que l’énergie baisse.
L’antidote de thina middha. Favoriser le développement de l’énergie (par exemple, en réduisant le temps d’assise et en marchant plus). Stimuler physiquement le corps : regarder quelques instants une source lumineuse, se mettre de l’eau froide sur le visage, effectuer quelques étirements, méditer debout.. S’intéresser sincèrement à l’objet de méditation.
Développer marananussati : la considération attentive sur le caractère inévitable de la mort. Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.



La métaphore de l’agitation mentale et les remords : On ne peut pas voir à travers une eau balayée par le vent.

L’agitation mentale et les remords (uddhacca kukkucca)

Comment reconnaître uddhacca kukkucca? Quand l’esprit n’est pas tranquille, qu’il se sent inquiet ou perturbé —ne serait-ce par un petit détail—, il y a agitation mentale. Quand l’esprit ressasse des actes qu’il regrette, il y a remords. Dans les deux cas, il est incapable de rester fixé sur un seul objet. Nous nous accrochons à ces pensées inconfortables, avec le sentiment que nous ne pouvons pas continuer notre méditation tant que le problème à l’origine de l’agitation mentale ou du remord ne sera pas réglé.
Le contraire de uddhacca kukkucca. Lorsque l’agitation mentale et les remords sont totalement absents, apparaît ekkagata, la concentration de l’esprit en un seul point. C’est le cinquième des cinq facteurs du 1er jhana. L’esprit est totalement unifié à son objet.
La cause de uddhacca kukkucca. Tant que l’esprit n’est pas bien centré sur son objet de méditation, il peut ressentir de l’ennui. Ainsi, il ne manque aucune occasion pour se divertir. Et quand il n’y a rien, que nous sommes immobiles les yeux fermés dans le silence, les moindres pensées, inconforts, inquiétudes, réflexions, souvenirs, culpabilités, sentiments et sensations sont comme autant de «chaînes de télévision» dans lesquelles nous nous absorbons de manière insatiable, même quand c’est désagréable. On adore parler de ses problèmes!
Si on laisse une seule fourmi apercevoir un cake, elle invite toute la fourmilière. De la même façon, quand nous commençons à «écouter» un de nos problèmes, même insignifiant, nous invitons toute la «fourmilière» d’uddhacca kukkucca : une myriade d’inquiétudes en tout genre. Cet état d’agitation intérieure peut même provoquer des démangeaisons physiques.
Si nous ne soignons pas bien la qualité de nos actes, cela engendrera des remords apparaissant pendant la méditation. Les états où l’activité mentale est relativement calme constituent un terrain très propice à la remontée en surface des regrets et culpabilités liés aux méconduites de toutes sortes, même très anciennes. C’est pourquoi il importe d’entretenir constamment une conduite vertueuse et aussi irréprochable que possible. Sans une vertu pure, la méditation ne restera qu’un champ d’obstacles.
L’antidote de uddhacca kukkucca. Entretenir continuellement un comportement vertueux à la fois physiquement et mentalement, même quand on ne médite pas. Renoncer à nourrir un sentiment d’agitation mentale ou un remord, quels qu’ils soient et de quelle façon que ce soit. Se rappeler que l’esprit est ravi de saisir n’importe quelle occasion pour se divertir, même des sentiments désagréables. Se déterminer à ne pas bouger du tout. Physique ou mentale, toute gêne, inquiétude ou inconfort finit par disparaître, à condition de l’ignorer.
Équilibrer les 5 indriyas, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.



La métaphore du doute : On ne peut pas voir à travers une eau trouble.

Le doute (vicikiccha)

Comment reconnaître vicikiccha ? Si le cheminement que nous suivons semble se compliquer, que notre perception des choses perd de sa clarté, la confusion s’installe et nous n’arrivons plus à avancer ou pire : nous ne voulons plus poursuivre. L’esprit embrouillé, nous pouvons commencer à douter, non seulement de nos capacités, mais aussi de notre guide, de la méthode enseignée, de la méditation en général, de Bouddha ou du Dhamma.
Le contraire de vicikiccha. Lorsque le doute est totalement absent, apparaît vitakka, la prise ferme. C’est le premier des cinq facteurs du 1er jhana. L’esprit se saisit de son objet. D’une certaine façon, le doute a pour contraire la confiance, mais une fois celle-ci parfaitement établie, elle correspond inévitablement à une ferme saisie de l’objet.
La cause de vicikiccha. Les principaux artisans du doute sont le découragement, «Je n’y arrive plus. Je ne sais plus comment m’y prendre…» et le scepticisme, «C’est impossible. Je n’ai jamais vu ça…». Naturellement, des informations erronées, contradictoires ou mal interprétées peuvent y contribuer. Le doute est un sentiment de blocage qui paralyse tout souhait d’effort dans la pratique. Notre tendance naturelle est d’employer la réflexion pour y remédier, mais celle-ci ne peut au mieux que masquer temporairement le doute car elle se base sur des pensées, donc sur des concepts.
L’antidote de vicikiccha. Pratiquer les préceptes, la concentration et l’attention. Seul l’exercice de la vertu, de la concentration et de l’attention est en mesure d’anéantir peu à peu le doute. Comprendre ce qui est pratiqué en se renseignant convenablement auprès d’individus compétents et inspirant la confiance.
Développer buddhanussati : la considération des qualités de Bouddha.
Équilibrer les 5 indriya, c’est-à-dire les cinq facultés de contrôle.




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