jeudi 5 septembre 2013

Le 1er obstacle à la méditation – kamachanda, le désir des sens – Ajahn Brahm(3)

Le 1er obstacle à la méditation – kamachanda, le désir des sens – Ajahn Brahm(3)

Vous ne pouvez décider d’abandonner les 5 sens et le corps par un simple effort de volonté. En méditation, cet abandon s’effectue petit à petit. On commence par choisir un endroit confortable et tranquille pour méditer. En fermant les yeux, vous ne sentirez pas grand-chose de votre corps. De même qu’il faut plusieurs minutes pour que la vision s’adapte quand on passe d’une pièce éclairée à l’obscurité, de même il faut plusieurs minutes pour être réceptif aux sensations corporelles. Ainsi, après avoir fermé les yeux, il faut plusieurs minutes pour régler définitivement la posture adoptée par le corps.

Céder ainsi à kamachanda par l’attention au corps permet de le dominer un certain temps. Votre corps se sentira à l’aise et les 5 sens seront satisfaits, mais cela ne durera pas. Vous devez utiliser cette liberté initiale pour placer l’esprit hors de portée des 5 sens. Vous commencez par la vigilance à l’instant présent. Notre passé et notre futur sont remplis, en majeure partie si ce n’est totalement, d’objets liés aux 5 sens. Nos souvenirs sont faits de sensations physiques, saveurs, sons, odeurs ou objets visibles. De la même façon, nos projets portent sur les 5 sens. En réalisant la vigilance à l’instant présent, on se débarrasse de kamachanda pour une bonne part.

Dans le stade suivant de la méditation, dans la vigilance silencieuse à l’instant présent, on abandonne toute pensée. Le Bouddha a identifié un aspect de kamachanda qui est appelé kamavitakka, ce qui signifie « penser au monde des 5 sens ». Pour le débutant, sa forme la plus évidente est le fantasme sexuel. On peut passer de nombreuses heures, surtout lors d’une longue retraite, avec ce type de kamavitakka . Cet obstacle au progrès en méditation est transcendé en prenant conscience, par la vue pénétrante ou la conviction, qu’être totalement libre des 5 sens ( par jhana) est bien plus extatique et plus profond que la meilleure expérience sexuelle possible.

Un moine ou une nonne abandonnent leur sexualité non par crainte ou par refoulement, mais parce qu’ils prennent conscience de quelque chose de supérieur à cela. Même les pensées d’après-déjeuner relèvent de kamavitakka, elles perturbent le silence. Et peu de méditants se rendent compte que de noter les sensations corporelles, comme de penser en soi-même « inspirer le souffle », « entendre un son » ou « ressentir une douleur perçante », fait aussi partie de kamavitakka et est un obstacle à la progression.

Dans la vigilance silencieuse à l’instant présent, c’est comme si le monde des 5 sens était à présent confiné dans une cage, incapable de vagabonder ou de faire des bêtises. Ensuite, pour abandonner complètement les 5 sens et le corps avec eux, on choisit de concentrer sa vigilance sur une petite partie du monde des 5 sens à l’exclusion de tout le reste. On se concentre sur la sensation physique du souffle, en ignorant les autres sensations corporelles, les sons, etc.. Le souffle devient la passerelle entre le monde des 5 sens et le monde de l’esprit.

Quand vous aurez réussi la vigilance pleine et soutenue sur le souffle, vous remarquerez l’absence de tout son. On ne peut jamais reconnaître l’instant où l’ouie cesse, parce que par nature elle s’éteint graduellement. Une telle extinction, comme la mort physique  est un processus et non pas un événement. Vous vous rendrez compte en général, quand vous passerez votre méditation en revue en fin de session, que votre esprit a été indifférent à tout bruit pendant un certain temps. Vous remarquerez aussi que votre corps avait disparu, que vous ne pouviez plus sentir vos mains ni recevoir de message de vos jambes. Tout ce que vous connaissiez se limitait à la sensation du souffle.

Certains méditants commencent à s’inquiéter quand ils ne sentent plus certaines parties de leur corps. Cela témoigne de leur fort attachement au corps. C’est kamachanda à l’œuvre, qui vient bloquer les progrès en méditation. En général, on finit par se familiariser avec cette disparition des sensations corporelles et l’on se réjouit de cette merveilleuse tranquillité qui les dépasse. Ce sont la libération et la joie nées du lâcher-prise qui encouragent de façon répétée à abandonner les attachements.

La sensation d’être « désincarné » que l’on ressent parfois est une étape normale, et un cas pathologique de la méditation, une fois obtenu un certain détachement du corps. Ajahn Brahm évoque parfois ce sujet dans ses causeries sur le ton de la plaisanterie : « mais où est passé mon corps ? ». Le neurologue peut bien parler à ce propos de « perte de proprioception » ou de désafférentation, il reste prisonnier de l’idée fausse qu’il y a un « soi », et que celui-ci devrait « normalement » s’approprier les sensations du corps.
Le bouddhisme cherche plutôt la délivrance.

Bientôt le souffle disparaît, et le grandiose nimitta occupe votre esprit. Ce n’est qu’à ce stade que vous avez abandonné complètement kamachanda, votre implication dans le monde des 5 sens. Car dès que le nimitta est établi, les 5 sens sont éteints, et le corps n’est plus accessible. Le premier et principal empêchement a été surmonté, et ce n’est que du bonheur. Vous êtes à la porte des jhanas. Voilà la méthode pour abandonner kamachanda petit à petit. C’est pour cela que l’on enseigne les stades de méditation de cette manière. 
Comme il est dit dans les Jatakas ( Ja,4,173) : « plus on abandonne le monde des 5 sens, plus on ressent la félicité ; pour ressentir une béatitude complète, abandonnez complètement le monde des 5 sens ».

note. Quand les 5 sens disparaissent, le corps disparaît aussi. Il disparaît dans le sens où il ne fait plus l’objet d’une observation, il n’apparaît plus à la conscience.

supa. cela est réalisé notamment par l’exercice Anuloma Viloma Shiva ou l’exercice Soham.
   




Le premier obstacle - le désir des sens, kamachanda – Ajahn Brahm (2)



Kammachanda, le désir des sens, est le premier sur la liste des empêchements en raison de son importance. 

C’est l’obstacle principal à l’entrée en méditation profonde. Peu de méditants en comprennent complètement l’ampleur : ce n’est pas seulement le désir sensoriel tel qu’on l’entend en général. Pour commencer, le terme pali kama désigne tout ce qui appartient aux cinq sens, vue, ouie, odorat, goût et toucher. Chanda signifie se réjouir de, ou être en accord avec.  Donc, le terme composé kamachanda signifie « réjouissance, intérêt, implication dans le monde des 5 sens.

Par exemple, quand vous êtes en méditation et que vous entendez un son, pourquoi ne pouvez-vous pas l’ignorer ? pourquoi est-ce tellement perturbant ? Il y a plusieurs années en thailande, les villages qui entouraient notre monastère avaient organisé une fête. Le bruit qui venait des hauts-parleurs était si fort qu’il semblait détruire la paix de notre monastère. Nous nous sommes alors plaint après de notre maître Ajahn Chah de ce bruit qui perturbait notre méditation. Le maître répliqua : « ce n’est pas le bruit qui vous perturbe, c’est vous qui perturbez le bruit ! »

Dans cet exemple, kamachanda  représente l’esprit qui s’implique dans le son. De la même façon, quand votre méditation est interrompue par une douleur dans la jambe, ce n’est pas la douleur qui vous dérange, mais c’est vous qui dérangez la douleur.  Un peu d’attention vous aurait montré que votre vigilance s’était distraite sur le corps, que vous vous étiez intéressé de nouveau aux sensations : c’est kamachanda en action.

Il est difficile de surmonter kamachanda tellement nous sommes attachés aux 5 sens et à ce qui s’y rapporte. Tout ce à quoi nous sommes attachés, nous jugeons impossible de nous en libérer. Pour comprendre cet attachement, il est utile d’examiner la relation entre nos 5 sens et le corps. On prétend en général que les 5 sens sont là pour protéger le corps, mais la vue profonde nous montrera le contraire : le corps est là pour fournir un véhicule pour que les 5 sens puissent s’exercer dans le monde. Vous remarquerez ainsi que quand les 5 sens disparaissent, le corps disparaît aussi. Abandonner les uns revient à abandonner l’autre.

dimanche 1 septembre 2013

L'arme ultime qui tranche toute souffrance: Buddho, Metta, Upekkha

Le rappel ultime dans la méditation, l'arme qui tranche toute souffrance à la racine

S’il n’y avait que 3 choses à se rappeler pendant la méditation,
Ce serait peut-être Buddho, Metta, Upekkha


Buddho, c’est être illuminé, complètement éveillé, conscient ici et maintenant ( en Pali le dialecte du Bouddha). Cela est très inspirant pour affermir la concentration au maximum sur l'objet de la méditation. 

Metta, c’est donner le pardon et la bienveillance à soi, aux autres et toute la Nature. Cela est très inspirant pour la résolution de tout mécontentement vis-à-vis de soi ou des autres pendant ou hors méditation. La colère, malveillance, mécontentement ne s'éteint que par l'amour.


Upekkha, c’est être observateur, détaché, équanime, avoir le regard neutre sur tous les phénomènes. Attachement-détachement, identification-désidentifiation, acteur-observateur..

Par moments en tant que mantra, pour bien ancrer le pouvoir de ces outils et repousser toutes pensées préocuppantes, 
Par moments en comprenant clairement la signification de cela,
Puis la plupart du temps, en lâchant prise sur le concept Buddho-Metta-Upekkha pour l’appliquer à l’observation attentive de la respiration et de l’instant présent.

Bonne méditation !

Buddho-Metta-Upekkha